La logique aurait donc voulu que l’on prenne du vin rouge, comme le sang, mais c’est le vin blanc qui est utilisé. A priori personne ne s’en soucie et l’Eglise se garde bien de prendre les devants pour s’expliquer. Il faut un fouilleur entêté comme moi pour empêcher de dormir. A force d’insistance, une structure religieuse, étonnée de ma persévérance, a bien voulu me dire ce que je subodorais à savoir que le vin de messe est blanc pour ne pas marquer les linges liturgiques. Je comprends bien entendu, mais on peut mesurer que c’est une grave prise de liberté avec les principes. J’ai écrit cela il y a longtemps mais c’est seulement cette année que j’entends un journaliste (Bernard Pivot) poser la question ou du moins s’étonner de la réponse ! Bref, cette position religieuse globale est une formule, mais elle ne résoud pas grand chose. Elle a simplement l’avantage de donner ce qui est peut-être une vraie réponse mais en image d’Epinal. Il faudrait alors l’adapter, la moderniser.

Comme première réaction à ce voeu on peut retenir du Père Olivier de la Brosse cette phrase : ...Plus on trouvera de formes de vie extraterrestres plus cela contribuera à prouver l'origine de Dieu... Quand un Chrétien entend parler de notion d'infini, il ne peut que se réjouir de sortir du quotidien. C’est d’autant plus intéressant que le Père fut le porte-parole de la Conférence des Evêques de France.

Déjà, ce que l’on sait maintenant du distinguo corps/esprit permet de voir les choses autrement. On est bien en accord pour dire que le corps bien apprécié - je le reconnais - n’est qu’une sorte de machinerie destinée à supporter le fonctionnement technique de l’esprit. On le voit bien avec toutes les implications de dons d’organes, etc. Quoi qu’il en soit, nous pouvons tous nous entendre sur une permanence de la matière. Assez de philosophes ou scientifiques l’ont dit mais c’est toujours quelque chose qui a du mal à entrer dans nos réflexions prolongées vite détournées. Après le décès, la matière inactivée peut vraisemblablement revenir dans le cycle animé sous forme d’une réintégration dans le vivant. L’Homme est “poussière d’étoiles”. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme et il faut du temps. Il y a un peu de cela dans le poème africain de Birago Diop “Souffles, leurres et lueurs” : ...Les morts ne sont pas sous la terre, ...Les morts ne sont pas morts. Ou dans la célèbre phrase égyptienne : Vous n’allez pas n’importe où quand vous mourrez. Vous êtes toujours présent. On en retrouve la confirmation dans le “texte des pyramides” reconstitué par Lauer : Ce n’est pas mort que tu t’en es allé, c’est vivant que tu t’en es allé. Pour ma part, j’aurais aimé qu’il soit ajouté : ... et c’est vivant que tu es arrivé. De toute façon, c’est le “Je reste avec vous” que Jean Cocteau a fait graver sur sa tombe à Milly la Forêt. Mais, à ce niveau, on voit qu’on commence à esquisser le parcours futur du corps et de l’esprit.

A ce stade donc, nous venons de philosopher plus profondément qu’il n’y paraît sur ce distinguo corps/esprit. Disons le tout net, chacun est à peu près conscient de la persistance de la matière quelle qu’en soit la forme. Mais chacun également aimerait en savoir plus sur le sort de l’Esprit, l’âme dirait-on. Il est bien difficile de répondre en l’état des choses actuel. Déjà, les réflexions s’entrecroisent avec une telle intensité qu’il est ardu de vouloir les restituer, chacune empiétant sur l’autre. Dès que l’on comprend - ou qu’on croit comprendre - un petit quelque chose, il s’imbrique avec un autre petit “autre chose”, de telle sorte que le tout devient vite inintelligible. Il n’est pas facile de s’expliquer. Il faut travailler avec le sens d’un certain niveau de superposition. Pour transmettre plus commodément on est amené à des répétitions voire à des omissions passagères.

Mais tout de suite, pour montrer la facilité d’escamotage des problèmes, je veux évoquer les remariages. Le mariage étant indissoluble selon l’Eglise, elle ne veut pas cautionner le mariage des divorcés, cela reste dans sa logique. Pourtant, dans un but éminemment social et humain, elle bénit le remariage des veufs ou veuves, et tant mieux. Mais alors, comment se retrouveront ces couples au Paradis ? On va avoir de superbes familles recomposées, sortes de ménages à trois (ou quatre)... On me dira qu’au Paradis, tout est spiritualité et que le sexe en est absent. Bien, même s’il est agrémenté, selon certains, de vierges disponibles. Mais, tout de même, pour revenir aux remariés légaux, que dire d’une “partouze” fut-elle simplement spirituelle ? L’Eglise se garde bien de répondre. Elle veut ignorer cet aspect du problème, là comme ailleurs, s’en remettant probablement à Dieu. Or, Celui-ci qui a tant parlé directement aux Hommes (suivant la Bible) ne dit plus grand chose depuis longtemps. Alors il nous faut imaginer... En tout cas, même si l’Eglise a voulu privilégier l’aspect social, ce qui est a son honneur, elle est quand même coupable d’avoir escamoté la suite. Singulière manière de trancher le débat. Et que dire d’autres coutumes étrangères qui font épouser la veuve par le frère du disparu ? Ou des sociétés autorisant la polygamie et que Dieu ne peut ignorer. Autant d’observations qu’il fallait faire remonter pour permettre d’apprécier.

D’autres remarques émergent. Par exemple, lorsque le livre sacré évoque la résurrection qui est une sorte de sublimation. Si l’on retient l’âme restaurée avec ou sans corps, on doit tout de même se demander ce que deviennent les restes enterrés et restés sur terre. “Tu redeviendras poussière...” est-il dit. Bon, en ce cas la poussière est homogène, ennoblie, elle est redevenue Terre. Oui mais... Ce constat peut conduire - il faut le dire - à un concept formel d’un corps-support sans intérêt aucun dès lors que, usé, il a laissé partir l’âme ou cette énergie-programme qui est l’essentiel et qui repart, amplifiée, magnifiée... Mais pourquoi les os subsistent-ils ? Pas de réponse. Que deviendra, en haut, cette “réhabillée” sans ses os ? Une partie en haut, une partie en bas ? Désordre. J’insiste : « Poussière tu es, poussière tu redeviendras » . Oui, pour les chairs mais les Os ? On objectera qu’ils doivent être durs pour tenir le corps dans son ensemble. Bien sûr, mais ils pourraient s’effriter très vite dès que la Vie s’en est allée. Au lieu de cela on retrouve ces os, même après des dizaines de millions d’années ce que l‘on constate, entre autres, avec nos chers dinosaures. Pourquoi ? Quelle en est la raison, car il doit bien y en avoir une. C’est le genre d’interrogation qu’il faut poser car tout le monde s’est bien résigné à ce fait sans pousser plus loin. Et mis en garde par moi, la plupart se demanderont pourquoi je soulève le problème. Mauvais point. Interrogation pour interrogation, ce n’est pas la bonne que se poseront les Hommes !

On peut déplorer le manque d’informations dans lequel nous a laissé l’Eternel (ou toute autre forme de programmateur) sur les durées de vie, vie physique avant même celle intemporelle. Si l’être humain a légiféré sur l’interruption de grossesse il n’a pas poussé très loin son organisation ou son interprétation de l’interruption de vie, mais ça peut venir d’autant plus que la première est déjà une forme de l’interruption de vie. Vaste débat... Et encore, nous sortons tout juste du Siècle des fanatismes et affrontements sur fond de religion-alibi que déjà les schémas se reproduisent, surtout vers l’Orient ! Enfin, dans cette grande party que nous promettent ces religions, au ciel, je m’interroge sur le type de relations qui vont s’établir entre les ressuscités Gaulois, ceux de maintenant et … ceux de demain ! Singuliers dialogues…